RDC : L’Assemblée nationale autorise les poursuites judiciaires contre Constant Mutamba pour « détournement de fonds »

À l’issue d’une séance plénière tenue ce dimanche 15 juin à l’Assemblée nationale, les députés ont voté en faveur de la requête du procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, autorisant les poursuites judiciaires contre le ministre d’État en charge de la Justice, Constant Mutamba. Ce dernier est accusé de détournement présumé de 19 millions de dollars américains destinés à la construction d’une prison à Kisangani, dans la province de la Tshopo.

C’est la commission spéciale temporaire de l’Assemblée nationale, chargée d’examiner le réquisitoire du parquet, qui a présenté un rapport accablant sur les faits reprochés au Garde des Sceaux. Selon le procureur général Firmin Mvonde, les auditions successives de Constant Mutamba, menées dans le cadre de l’enquête pré-juridictionnelle, n’ont fait que renforcer les soupçons du parquet.

« Les explications fournies n’ont apporté aucun élément de nature à infirmer les faits mis à sa charge. Au contraire, elles ont permis de comprendre et d’asseoir davantage l’accusation », peut-on lire dans le document lu devant les députés.

L’origine de l’affaire repose sur un marché public attribué à une société dénommée Zion Construction, censée construire une maison carcérale à Kisangani. Or, les enquêteurs du parquet général n’ont trouvé ni siège social de l’entreprise, ni site d’implantation des travaux. Pire encore, aucun des associés de cette société ne semble identifiable, plusieurs faisant même l’objet d’avis de recherche.

Le ministre Mutamba n’aurait pas vérifié l’existence réelle de la société, ni contrôlé les ouvrages ni le personnel technique censé intervenir sur le terrain. Le parquet parle d’une « société de façade constituée dans le seul but de détourner les fonds publics », initialement alloués à la réparation des dommages liés à la guerre des Six Jours à Kisangani.

Parmi les faits reprochés : absence d’autorisation préalable du gouvernement, absence de documents à la Direction générale du contrôle des marchés publics (DGCMP), et surtout un paiement de 19 millions USD effectué le 16 avril vers un compte privé et non séquestre. Ce transfert, jugé illégal, constitue l’élément central de l’accusation de détournement de deniers publics.

Face à l’intensification de l’enquête, Constant Mutamba a adressé, le 10 juin, une lettre de récusation visant directement le procureur général Firmin Mvonde ainsi que les magistrats de son office. Il les accuse d’« inimitié personnelle manifeste » et évoque l’article 59 de la loi sur l’organisation , la compétence et fonctionnement des juridictions de l’ordre judiciaire pour justifier sa démarche. Une tentative perçue par plusieurs observateurs comme une manœuvre de blocage judiciaire.

Alors qu’il était attendu pour une troisième audition le lundi 9 juin, le ministre ne s’est pas présenté en personne, se faisant représenter par ses avocats. Une absence qui a encore davantage crispé les relations entre le parquet et le ministère de la Justice. Un mandat d’amener n’est désormais plus exclu, surtout après l’aval donné par les députés à la poursuite judiciaire.

Si Constant Mutamba incarne depuis plusieurs mois la ligne dure du pouvoir dans les dossiers politico-judiciaires, il se retrouve aujourd’hui dans la position de l’accusé, avec à la clé une éventuelle arrestation et une comparution devant la Cour de cassation. Entre-temps, c’est son vice-ministre de la justice, Samuel Mbemba Kabuya qui sera nommé à ce poste pour assurer l’intérim.

CTMAMPUYA

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