Les organisations de défense des droits des journalistes et de promotion de la liberté de la presse, Journaliste en Danger (JED) et Reporters Sans Frontières (RSF) ont tenu une conférence de presse ce jeudi 19 octobre 2023 à Kinshasa. Occasion pour elles, de demander aux autorités congolaises de libérer le journaliste Stanis Bujakera, correspondant du magazine Jeune Afrique, incarcéré depuis le mois de septembre au centre pénitentiaire de Makala.
M. Bujakera fait face à des accusations de « propagation de faux bruits » et de « faire de fausses nouvelles » suite à un article retraçant les circonstances de la mort de l’ancien ministre Chérubin Okende. Arnaud Forger de RSF a qualifié ces accusations d' »intolérables » et de « grotesques ». De ce fait, au nom de son organisme, il a demandé que les charges retenues contre Bujakera soient abandonnées. À défaut de cela, il demande au minimum sa remise en liberté provisoire.
«Ce que nous demandons, c’est évidemment l’abandon des charges contre lui, mais aussi dans un premier temps qu’il puisse recouvrer sa liberté, car il n’aurait jamais dû être arrêter encore moins dû être incarcéré», a déclaré Arnaud Forger, responsable du bureau d’investigation de Reporters Sans Frontières.
Toujours selon ce cadre de Reporters Sans Frontières, les chefs d’accusation contre Stanis Bujakera se sont aggravés au fil du temps, passant d’une simple « propagation de faux bruits » à des accusations d’être un « faiseur de fausses nouvelles ». Pour lui, de telles accusations sont « intolérables » et auront du mal à être prouvées.
Ce dernier fait savoir, en outre que, le journaliste est aussi accusé, de manière « grotesque », d’avoir ourdi un complot de l’extérieur pour diffuser des informations compromettantes dans le but de déstabiliser le régime en place.
Pour sa part, le secrétaire général de Journaliste en Danger (JED), Tshivis Tshivuadi a rappelé que l’une des promesses du président de la République, Félix Tshisekedi faite lors de son passage à New-York, (USA) était notamment celui de sauvegarder les droits de Bujakera.
En effet, d’après les explications de Tshivis Tshivuadi «étant donné qu’aucune infraction contre le journaliste Bujakera n’est encore pour le moment pas établie, il bénéficie par conséquent de la présomption d’innocence». Il estime dans ce cas que, sa détention enfreint ses droits.
« Je voudrais juste rappeler ce qu’avait dit le président de la République lors de son passage à New-York. Je pense qu’il avait été interrogé sur ce cas et qu’il avait dit qu’il n’entendait pas se mêler des procédures judiciaires et qu’il voulait laisser la justice faire son travail et qu’en toute état de cause, il allait veiller à ce que le droit du journaliste Stanis Bujakera soit sauvegardé. Aujourd’hui j’estime que l’un des droits de ce dernier n’est pas respecté, c’est sa présomption d’innocence. Ça fait bientôt deux mois qu’il est détenu sans jugement et sans avoir été condamné et donc, il a droit à la présomption d’innocence puisque certaines infractions ne sont pas encore établies.», a-t-il expliqué.
À cette occasion, Tshivis Tshivuadi joint sa voix à celle de son collègue de Reporters Sans Frontières pour exiger l’abandon des charges retenues contre le Directeur de publication adjoint d’Actualité.cd.
« Je voudrais lancer encore cet appel encore une fois de plus et rejoindre ce qui a été dit, il doit être libéré parce que sa place n’est pas non seulement en prison mais il doit être libéré et il doit pouvoir jouir de sa présomption d’innocence d’un droit fondamental pour tout citoyen », a déclaré M. Tshivuadi.
Compte tenu des accusations qui pèsent contre Stanis Bujakera, la plus forte peine qu’il encourt est « de 10 ans, prévues par le code du numérique », a en croire son avocat, Charles Mushizi. Dans la foulée, ce dernier estime que les infractions mises à la charge de son client sont issues « de la violation de l’intimité du journaliste. Ce qui est une infraction »
Tout est parti d’un article qui n’a pas été signé par Stanis Bujakera retraçant les dernières heures de vie de l’ancien ministre des transports et député national, Chérubin Okende. C’est sur base de cet article que la police, ensuite le parquet ont déclenché une enquête contre ce chevalier de la plume.
D’après la justice congolaise, après son interpellation à l’aéroport international de N’djili, la fouille du téléphone et de l’ordinateur du journaliste a révélé qu’il y a eu communication entre lui et ses confrères d’un rapport de l’agence de renseignement, à la base de cet article. Entre-temps la deuxième audience sur ce procès est prévue ce vendredi 20 octobre à Makala.
Christian-Timothée MAMPUYA