Tshisekedi-Kagame: Entre « moindre escarmouche » et « dialogue au ciel », l’histoire d’une vision clairement exprimée (Tribune )

La petite histoire…

Ça aura été un recit de « gros » biceps, entre le Président Congolais et son homologue Rwandais. On se souviendra qu’en dépit des avancées sur terrain des troupes rwandaises et de leurs supplétifs, le chef de l’État Congolais n’a eu de cesse, de rassurer sa population déjà lasse, de la série d’agressions interminables dirrigée depuis Kigali. C’est dans ce cadre que les expressions « dialogue au ciel » et « moindre escarmouche  » ont été sorties. L’adhésion des congolais à ces prises de position s’est popularisée avec le temps, sans que l’opinion générale ne s’en lasse malgrė ĺ’entetement des hommes de Kagame qui ont poursuivi sans gêne aucune, leurs visées expansionnistes.

Le « dialogue au ciel »…

« Je ne discuterai plus avec Paul Kagame. Je le ferai seulement au ciel devant le jugement de Dieu », avait déclaré Félix Tshisekedi, lors du lancement de sa campagne électorale pour la présidentielle du 20 décembre 2023. C’était le 19 novembre de la même année au stade des Martyrs.
Une déclaration qui avait suscitée de gros applaudissements de la part des prés de 100.000 Kinois rassemblés dans cet antre sportif pour la circonstance. Une population qui, à juste titre, a représenté les 120 millions des congolais décidés à régler ses comptes à Paul Kagame. La colère est justifiée par les multiples agressions dont la RDC est victime depuis trois décennies. Félix Tshisekedi connaissant cela, a sauté sur l’occasion pour se présenter devant ses compatriotes comme l’homme de la situation .

Moindre escarmouche…

« Moindre escarmouche », telle est cette autre expression contenue dans un ultimatum lancé par le président congolais à son homologue Rwandais. « Si j’entends encore le bruit d’une seule escarmouche dans une localité de l’Est, je saisirai les deux chambres du parlement pour déclarer la guerre au Rwanda « , avait-il déclaré le 18 décembre 2023, cette fois ci au terrain Sainte Thérèse de Ndjili à Kinshasa. C’était pratiquement la phrase que les congolais attendaient. Pour eux, la seule manière de se faire respecter par le Rwanda, était de lui faire la guerre. Tshisekedi a été, à ce moment là, l’homme qui rendait réelle l’aspiration des Congolais pour en découdre avec cette occupation des voisins. Là encore, l’adhésion du peuple à son candidat était palpable.

Vision clairement exprimée

Mais pourquoi Félix-Antoine Tshisekedi devrait-il tracer cette ligne rouge, sans agir comme promis ? En tout cas, la réponse est à trouver dans ses statuts. Tant pour le « dialogue au ciel » que pour la « moindre escarmouche », le Président sortant Rd Congolais, à la recherche des suffrages, s’éxprimait dans le cadre de la campagne électorale qui l’opposait à ses principaux adversaires à savoir Moise Katumbi et Martin Fayulu. Par quoi devrait-il les battre, eux qui étaient assez réservés sur la question de la guerre de l’est ? Et bien, pour Tshisekedi, la solution était de braver la peur et montrer les biceps pour affronter l’agresseur. Une recette payante qui a débouché sur la victoire du candidat N°20.

Ni au ciel, ni la guerre

Après sa réélection et son investiture pour un second mandat, Félix-Antoine a revêtu de son étoffe d’homme d’Etat. La popularité dont il a été crédité pendant la campagne électorale ne guidant plus ses décisions, encore moins ses émotions, il était sensé évaluer la situation pour se donner les moyens de changer la donne dans ce conflit avec le Rwanda.
Sur les champs de bataille, la situation sécuritaire sur le terrain n’a fait que se détériorer. Plusieurs escarmouches ont été tirées. Les villes de Goma et Bukavu sont tombées et Tshisekedi n’a finalement pas déclaré la guerre au Rwanda, se montrant plutôt ouvert à un dialogue direct avec son homologue Rwandais.

Le ciel, c’était Doha et la guerre, le pire à éviter

Alors que les négociations directes annoncées entre Kinshasa et le M23 à Luanda, capitale de l’Angola avait capoté, Tshisekedi a rencontré son homologue Rwandais Paul Kagame à Doha au Qatar. Les deux hommes ont pris l’engagement pour un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel, de quoi raviver la polémique au sein de l’opinion congolaise. « Il avait dit qu’il ne parlera à Paul Kagame qu’au ciel, mais pourquoi a-t-il fini par le faire à Doha ? », S’interroge encore une certaine opinion, le traitant d’indecis.

Le monde retiendra qu’au finish, Félix Tshisekedi s’est révélé être un savant politique. Un connaisseur du rôle de candidat à la présidentielle qu’il était et celui d’homme d’état qu’il est devenu. Avec les suffrages déjà obtenus, le chef de l’État Congolais a su dialoguer au moment opportun pour offrir la paix à son pays. Déclarer la guerre au Rwanda, aurait été cette autre erreur pouvant dresser les forces jadis acquises à Kigali contre la RDC, avec un nombre des conséquences à craindre. Les congolais devraient donc faire preuve de maturité pour saluer la finesse de la clairvoyance du chef de l’État qui, non seulement a protégé le pays, mais l’a conduit également à connaitre les véritables mobiles qui animent ses ennemis, tant en interne qu’à l’international.

Ambroise Mamba Ntambwe, journaliste et chercheur en sciences politiques

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